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Les Modes.

24 mars 2004 - par barpi75
Musique modale, musique tonale, vous vous dites : aïe! aïe! aïe! Certaines approches pédagogiques rendent la compréhension de ces différentes notions difficile. Pourtant, c'est relativement simple.

Bien sûr, on ne se passera pas d'un peu de théorie, mais cet article ne sera pas centré sur les règles très mathématiques de l'harmonie. Évidemment, mon propos pourra être qualifié d'hérétique. No problemo : chacun voit et doit voir midi à sa porte, et la sur-théorisation ou la sous-théorisation comme éventuel " fond de commerce " ou simple façon personnelle d'aborder les choses ne peuvent êtres critiquables en musique.

Il ne sera question, dans un premier temps, que de la gamme majeure, son harmonisation et des modes qui en découlent. Il y a un article sur MM, ici, qui vous rappellera les notions primordiales à connaître. Si vous avez le moindre doute sur vos connaissances théoriques, référez-y-vous.

Je suis guitariste, l'approche que j'ai eue des modes en découle énormément. Cet instrument permet en effet la transposition par la translation sur le manche, ce qui le rend très pratique (mais aussi rapidement mécanique ; il m'arrive néanmoins de pleurer, le soir, sur le sort des pianistes avec leurs touches noires et leurs touches blanches).
Le principe des modes.
    La musique tonale se réfère à la tonalité.
    Un morceau en E majeur, c'est 4 # à la clef, 7 accords parfaitement définis, et une gamme majeure de 7 notes.
    Point barre.
    Ça sonnera " juste " (et tonal) si on joue seulement ses septs notes. C'est un petit raccourci, parce que dans vos soli fiévreux, l'oreille vous interdira rapidement de plaquer la quarte d'un accord sur un temps fort. Donc, on ne parlera pas des "notes interdites", on supposera que vous maîtrisez.

    La musique modale, elle, considère qu'à chaque famille d'accord (M, m7, sus4, etc …), On peut associer plusieurs gammes de 7 notes, qu'on appellera désormais modes, indépendantes du contexte des accords qui passent ou de la grille du morceau mais uniquement liés à l'accord du moment. En fait, dans la musique modale, on ne se préoccupe pas vraiment des instants passés et futurs, seulement du présent.

    Pour information et ne pas semer le doute, le blues, c'est autre chose, ni modale ni tonale, un peu les deux. Nous n'en parlerons pas.
    Stop la moto.
      Dit comme ça, brutalement, ça pourrait laisser penser que les modes, c'est génial, c'est la Révolution, et que la musique tonale, c'est lourd et ennuyeux et coincé. Je dis non. La très très grande majorité de ce que nous écoutons, aimons et jouons est tonale. On verra d'ailleurs par la suite que les modes peuvent être une prison aux barreaux dorés, qu'on devra parfois s'en échapper (en jouant out) pour mieux y revenir (en jouant in). Les modes sont une corde de plus à notre arc, c'est tout. On ne peut pas les utiliser partout, tout le temps.
      La théorie, (ben si, il en faut).
        Je rappelle l'article, ici, dans lequel les notions de base, primordiales à la compréhension de cet article, sont expliquées.
        Donc, constituer 7 accords à partir de la gamme majeure (en empilant les tierces), soit harmoniser cette gamme, c'est dire qu'en C majeur, l'accord de D est de telle forme (et pas une autre), l'accord de G de telle autre, etc …

        Pour les accords à trois sons (tonique, tierce, quinte), cela donne :




        Pour les accords dits à quatre sons (tonique, tierce, quinte, septième), cela donne :




        Avec les accords complexes (plus de quatre sons, avec les 9èmes, 11èmes et 13èmes), on a :

        Les modes.
          Si l'on examine la structure de la gamme harmonisée à trois sons, on remarque tout de suite qu'il y a trois accords majeurs, trois accords mineurs (je ne parlerai du dernier, m7b5, pour l'instant).
          Pour la gamme harmonisée à quatre sons, il y a deux accords majeurs 7, un accord 7, trois accords mineurs 7.

          Examinons la grille suivante :





          Ces accords " appartiennent " à la tonalité de C majeur. Leurs fonctions tonales y sont, dans l'ordre d'apparition : I III VI IV V

          Improviser en C majeur va fonctionner. Il faudra juste ruser pour ne pas sonner " plan-plan ".

          Observons maintenant qu'il y a 3 accords majeurs de trois sons, deux mineurs de trois sons également. C'est maintenant que ça devient fun.
          Un accord majeur de trois sons, on l'a vu plus haut, peut avoir, dans une gamme majeure harmonisée les fonctions I, IV ou V.

          Un accord mineur de trois sons peut lui avoir les fonctions II, III, ou VI.

          Pour passer à l'improvisation modale, il suffit d'attribuer à chaque accord la fonction de votre choix qu'il aurait dans une gamme harmonisée qui n'existe pas dans le morceau que vous jouez. Je m'explique :

          On a vu qu'un accord mineur peut être le 3ème degré (III), jouons par conséquent la gamme majeure dans laquelle il serait III : sur un accord Em, jouez la gamme de C majeur. Évidemment (c'est un défaut systématique des guitaristes, les autres n'étant pas à l'abri non plus), il ne faut pas oublier que l'accord sur lequel on improvise est Em, arrêtez de faire sonner les notes caractéristiques (par réflexe) de la gamme de C majeur, écoutez et entendez le Em (dediou !).

          On en déduit les possibilités d'improvisation suivantes, pour chaque accord de la grille (l'ordre apparent du tableau n'est vraiment qu'apparent, sous chaque accord il n'y a aucune hiérarchie, et entre les différents accords, aucune règle de passage) :




          Pour chaque accord de la grille, on obtient ainsi trois possibilités, ce qui donne au total 35 possibilités d'enchaîner les gammes entre elles (soit 243), sachant que la plus triviale de ces possibilités est la combinaison tonale (C majeur sur tout le monde).
          Vous n'allez pas vous priver des 242 autres possibilités quand même !!

          Évidemment, plus les accords de la grille sont riches en sonorités, plus vos possibilités deviennent réduites : la forme 7M11# ne se rencontre qu'en position IV d'une gamme majeure harmonisée.

          Le nom des modes.
            Reprenons la structure de la gamme majeure harmonisée avec les accords complexes (plus de quatre sons) :




            Improviser en considérant qu'un accord est un 1er degré revient à jouer la gamme majeure correspondante, qui est du coup un mode, qu'on appelle mode Ionien ou mode de C (en se basant sur la gamme majeure harmonisée de C majeur pour des raisons de simplicité).

            Improviser en considérant qu'un accord est un 2ème degré revient à jouer la gamme majeure dont la tonique est située un ton sous celle de l'accord, qu'on appelle mode Dorien (ou mode de D).

            Improviser en considérant qu'un accord est un 3ème degré revient à jouer la gamme majeure dont la tonique est située deux tons sous celle de l'accord, qu'on appelle mode Phrygien (ou mode de E).

            Improviser en considérant qu'un accord est un 4ème degré revient à jouer la gamme majeure dont la tonique est située deux ton et demi sous celle de l'accord, qu'on appelle mode Lydien (ou mode de F).

            Improviser en considérant qu'un accord est un 5ème degré revient à jouer la gamme majeure dont la tonique est située trois ton et demi sous celle de l'accord, qu'on appelle mode Mixolydien(ou mode de G).

            Improviser en considérant qu'un accord est un 6ème degré revient à jouer la gamme majeure dont la tonique est située quatre tons et demi sous celle de l'accord ou un ton et demi au-dessus, qu'on appelle mode Aéolien (ou Éolien) (ou mode de A).

            Improviser en considérant qu'un accord est un 7ème degré revient à jouer la gamme majeure dont la tonique est située cinq tons et demi sous celle de l'accord ou un demi-ton au-dessus, qu'on appelle mode Locrien (ou mode de B).

            Vous aurez noter la finesse : jouer la gamme majeure dont la tonique est située quatre tons et demi sous celle de l'accord par exemple, c'est jouer les 7 notes qui composent cette gamme, mais formellement, un mode s'écrit et se distingue de la " gamme virtuelle " en débutant par la tonique de l'accord qui lui correspond.
            À titre d'exemple, E phrygien, c'est l'accord Em considéré en position III, c'est donc les notes de la gamme de C majeur, mais le mode s'écrit lui : E F G A B C D.

            En 1547, le clerc suisse Glareanus choisit (arbitrairement) des noms grecs. Donc, c'est comme ça, pas de question.

            Le son des modes.
              C'est d'abord à vous de les découvrir, mais il y a quand même quelques constantes.

              Une petite remarque pour commencer : a contrario de la musique tonale, chaque note aura quasiment le même poids dans votre oreille (le concept de notes " interdites " s'estompe). Rien n'attirera votre improvisation vers une note centrale. D'où le réflexe des jazzmen (et d'autres) de " sortir " de l'accord pour corser les choses (je rappelle au passage que sortir, c'est bien, mais que sortir sans revenir, c'est pas bien : c'est faux, y compris chez les superstars du jazz).

              Par respect pour les musiques ethniques venues du fond des temps et bien que certains modes sonnent " ethniques ", ne confondez pas tout : la majorité de ces musiques n'est pas dodécaphonique (nos 12 notes sont " fausses " à l'oreille mais mathématiquement justes).

              mode Ionien : évidemment c'est la sonorité de la gamme majeure de notre musique occidentale que vous connaissez par cœur, joyeuse, tout ça tout ça.

              mode Dorien : à la fois solennel et rapidement bluesy, "médiéval" ou celtique si l'on s'y prend bien.

              mode Phrygien : très tendu, triste et définitivement hispanisant (le " flamenco du pauvre ", en quelque sorte).

              mode Lydien : parfois comique, étrange, très planant (il paraît qu'on le trouve dans le folklore polonais, mais je n'en ai jamais écouté).

              Mode Mixolydien : fade ou joyeux, très difficile finalement à faire chanter, on le rencontre beaucoup dans le rock sixties, Chuck Berry en est un maître, parfois utilisé dans le jazz cubain.

              Mode Aéolien : c'est le son de la gamme mineure naturelle, gentiment mélancolique (d'où son utilisation fréquente chez Santana), vous pouvez le faire sonner un peu ancien.

              Mode Locrien : très étrange, et risqué. Rarement utilisé, essayez le sur un accord mineur, dans une ambiance un peu glauque ou métal.
              Les cas typiques d'utilisation et les limites des modes.
                1. Évidemment, on pense aux solos de la mort qu'on va envoyer à la prochaine répète ! On a raison. Vous découvrirez à vos dépens les frottements avec la basse ou le piano ou le chant ou autre si leurs parties sont harmoniquement riches. La limite des modes est là: dans un contexte tonal affirmé (avec des septièmes, des neuvièmes, des treizièmes, etc …), Il va falloir slalomer, et l'utilisation de certains modes sera très très moche.

                2. Aussi, on pense à tous les plans de la gamme majeure qu'on a bossé comme des malades (les triades, les plans en sixte, en tierce, les arpèges, …). On a encore raison : une fois la gamme majeure virtuelle identifiée mentalement, il suffira de les jouer. C'est certain qu'un instrument comme la guitare facilite cette gymnastique, puisque la transposition est très géométrique et visuelle.

                3. On s'était pris la tête à bosser les pentatoniques majeures. On peut s'en servir évidemment ! La pentatonique majeure virtuelle étant un sous-ensemble de la gamme majeure virtuelle.

                4. Ça fait 10 minutes que le même accord tourne en répète, on commence à s'ennuyer ferme. Le tonal tourne mal, le solo a du mal à relancer. Soit vous laissez tomber pour aller boire une bière soit vous tâchez de compliquer la grille sans quitter pour autant le côté tonal sur lequel votre bassiste insiste gravement.
                Notre gamme majeure (virtuelle) harmonisée va nous y aider. Pour ne pas trop sortir du tonal, on va utiliser des accords " castrés ", c'est-à-dire avec leur quarte à la place de la tierce majeure, ou la quarte à l'octave (la 11ème donc) avec la tierce mineure. Cela donne :




                Là, vous pouvez vous lâcher, remplacer l'accord que le groupe joue par tous ceux-là, dans l'ordre que vous voulez, en prenant ce que vous voulez. Pour les furieux qui ont un doute jusque-là, cela ne sonnera pas jazz si vous ne voulez pas que cela sonne jazz (enfin, j'me comprends : écoutez donc Wayne Kramer ou les intros / ponts de Dave Navarro).

                5. J'en ai marre de faire des arrangements un peu " plan plan ", j'ai l'impression de tourner en rond ! Considérer les choses comme aux points 4 ou 2 ou 3, ça peut vous éclaircir les idées.

                6. Tout ce que vous imaginerez.

                7. Cette approche des modes ne peut, ne doit et ne sera que temporaire pour vos soli. Au bout d'un moment, vous jouerez les doigtés des modes, plus les doigtés de la gamme majeure virtuelle.

                Tableau de synthèse – modes issus de la gamme majeure.




                  Nom du mode Ionien Dorien Phrygien Lydien Mixolydien Éolien Locrien

                  N'oubliez pas les accords en quarte. E sus4 est bien le IIIème degré de C majeur, le phrygien sonnera de façon très agréablement.

                  Les autres gammes harmonisées.
                    Tout ce qui a été vu avec la gamme majeure harmonisée fonctionne avec la gamme mineure mélodique harmonisée et la gamme mineure harmonique harmonisée.
                    Cela fait 14 modes en plus : leurs noms sont un peu plus compliqués et sujets à discussion (quoique se référant aux modes issus de la gamme majeure), les sonorités plus risquées et les accords enrichis moins utilisables et donc moins utilisés, mais certains sont déjà très célèbres (le mode altéré, celui de Bartók ; etc …).
                    Je donne les tableaux de synthèse pour les fous furieux.

                    Gamme mineure mélodique harmonisée :




                    Nom du mode Mineur mélodique Dorien b2 Lydien #5 Bartok Mixolydien b6 Locrien #2 Altéré

                    Les accords altérés sont des accords 7 (plus précisément 1 – 3 – 7) pour lesquels tous les enrichissements des autres notes sont permis. Le cas le plus connu est l'accord hendrixien par excellence, le E7 9# (dans lequel la tierce mineur à l'octave, soit la 9#, vient s'ajouter à la tierce majeure de l'accord). Sur E7 9#, pour tester la couleur du mode altéré, jouez ainsi F mineur mélodique. Robben Ford, dans le blues, est un maître du mode altéré.

                    Gamme mineure harmonique harmonisée :




                    Nom du mode Mineur mélodique Locrien #13 Ionien augmenté Dorien #11 Mixolydien b2 b6 Lydien #9 Locrien b7 b11

                  A propos de l'auteur: barpi75
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